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Les mandats

Dans le cadre de l’instruction {1}, plusieurs mandats peuvent être décernés. La plupart sont délivrés par le juge d’instruction (I) mais le juge des libertés et de la détention est seul compétent pour délivrer mandat de dépôt (II).


I. Les mandats délivrés par le juge d’instruction

L’article 122 alinéa 1ier du Code de procédure pénale dispose que : « Le juge d'instruction peut, selon les cas, décerner mandat de recherche, de comparution, d'amener ou d'arrêt »


1) Le mandat de recherche

Article 122 alinéa 2 du CPP


Conditions :

  • Le mandat de recherche peut être décerné à l'égard d'une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction (rappel : il s’agit d’une des conditions de fond du placement en garde à vue relative au degré d’implication du suspect).

  • Il ne peut être décerné à l'égard d'une personne ayant fait l'objet d'un réquisitoire nominatif, d'un témoin assisté ou d'une personne mise en examen {2}.


Définition / effet : 

  • C’est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la placer en garde à vue (dans les conditions prévues à l’article 135-1 CPP).

Remarque : le mandat de recherche existe aussi en phase d’enquête

  • L’article 70 du CPP prévoit que si les nécessités de l'enquête portant sur un crime flagrant ou un délit flagrant puni d'au moins trois ans d'emprisonnement l'exigent, le procureur de la République peut, sans préjudice de l'application des dispositions de l'article 73, décerner mandat de recherche contre toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre l'infraction


2) Le mandat de comparution   

Article 122 alinéa 4 du CPP 


Conditions 

  • Il peut être décerné à l’encontre d'une personne à l'égard de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction (rappel : cette formule correspond à celle de l’art. 80-1 du CPP relatif à la mise en examen), y compris si cette personne est témoin assisté ou mise en examen (cette condition de l’article 122 alinéa 3 du CPP est commune aux mandats de comparution, d'amener et d’arrêt).


Définition / effet : 

  • Il a pour objet de mettre en demeure la personne à l'encontre de laquelle il est décerné de se présenter devant le juge à la date et à l'heure indiquées par ce mandat.


Régime : il est signifié par commissaire de justice ou notifié par un agent de la force publique à l’intéressé (Article 123 alinéa 2 CPP).


3) Le mandat d'amener 

Article 122 alinéa 5 du CPP


Condition : 

  • Il peut être décerné à l'encontre d'une personne à l'égard de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction (rappel : cette formule correspond à celle de l’art. 80-1 du CPP relatif à la mise en examen), y compris si cette personne est témoin assisté ou mise en examen (cette condition de l’article 122 alinéa 3 du CPP est commune aux mandats de comparution, d'amener et d’arrêt).


Définition / effet : 

  • C’est l'ordre donné par le juge d’instruction à la force publique de conduire immédiatement devant lui la personne à l'encontre de laquelle il est décerné.

Remarque : il peut faire suite à un mandat de comparution infructueux mais pas toujours, ce n’est pas une condition pour décerner mandat d’amener.

Régime : il diffère selon l’endroit où la personne est appréhendée


1 - Si la personne est appréhendée à moins de 200 km ou à 200 km exactement du siège du tribunal du juge d'instruction qui a délivré le mandat, deux situations sont possibles

  • La personne doit être immédiatement interrogée par le juge d’instruction (article 125 alinéa 2 CPP)

  • Mais si l’interrogatoire ne peut pas être immédiat, la personne peut être retenue par les services de police ou de gendarmerie pendant une durée maximum de 24 heures suivant son arrestation avant d'être présentée devant le juge d'instruction (ou à défaut le président du tribunal ou un juge désigné par celui-ci, qui procède immédiatement à son interrogatoire). A défaut, la personne est mise en liberté. La retenue de cette personne pendant plus de 24 heures sans interrogatoire est considérée comme une détention arbitraire (article 126 alinéa 1ier CPP)

2 - Si la personne est appréhendée à plus de 200 km du siège du tribunal du juge d'instruction qui a délivré le mandat, deux situations doivent alors être distinguées :

  • S’il est possible de la conduire dans le délai de 24 heures devant le juge d’instruction auteur du mandat 🡪 dans ce cas, il faut revenir à la première hypothèse (personne appréhendée à moins de 200 km)

  • S’il n’est pas possible de la conduire dans le délai de 24 heures devant ce magistrat → la personne est conduite devant le JLD du lieu de l'arrestation. La personne a alors le choix entre (article 128 CPP) :

  • Accepter d’être transférée (autrement dit, la personne accepte d’être conduite jusqu’au juge d’instruction auteur du mandat)

  • Refuser d’être transférée en attendant la décision du juge d’instruction chargé de l’affaire. La personne est alors conduite en maison d’arrêt et le juge auteur du mandat est immédiatement informé. Le juge d’instruction décide, aussitôt après la réception de ces pièces, s'il y a lieu d'ordonner le transfèrement (article 129 CPP)

  • Si le juge ordonne le transfèrement, il doit s’opérer dans les quatre jours de la notification du mandat, sauf circonstances insurmontables (article 130-1 du CPP), des délais spéciaux étant prévus pour les territoires éloignés (article 130 alinéa 2 du CPP)

4) Le mandat d'arrêt 

Article 122 alinéa 6 du CPP 


Conditions 

  • Il peut être décerné à l’encontre d'une personne à l'égard de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction (rappel : cette formule correspond à celle de l’art. 80-1 du CPP relatif à la mise en examen), y compris si cette personne est témoin assisté ou mise en examen (cette condition de l’article 122 alinéa 3 du CPP est commune aux mandats de comparution, d'amener et d’arrêt).

  • La personne est en fuite ou réside hors du territoire de la République et encourt une peine d’emprisonnement correctionnelle ou une peine criminelle. Le procureur de la République doit donner son avis (article 131 du CPP)


Définition / effet :

  • C’est l'ordre donné par le juge d’instruction à la force publique de rechercher une personne et de la conduire devant lui après l'avoir, le cas échéant, conduite à la maison d'arrêt indiquée sur le mandat, où elle sera reçue et détenue.


Régime : (article 133 du CPP)


1 - Si la personne est appréhendée à moins de 200 km ou à 200 km exactement du siège du tribunal du juge d'instruction qui a délivré le mandat :

  • Elle est présentée dans les 24 heures suivant son arrestation devant le juge d'instruction (ou à défaut le président du tribunal ou le juge désigné par celui-ci) pour qu'il soit procédé à son interrogatoire. A défaut, la personne est remise en liberté (à peine de détention arbitraire).

2 - Si la personne est appréhendée à plus de 200 km du siège du tribunal du juge d'instruction qui a délivré le mandat, deux situations doivent être distinguées :

  • S’il est possible de la conduire dans le délai de 24 heures devant le juge d’instruction auteur du mandat → dans ce cas, il faut revenir à la première hypothèse (personne appréhendée à moins de 200 km).

  • S’il n’est pas possible de la conduire dans le délai de 24 heures devant ce magistrat → la personne est conduite devant le juge des libertés de la détention du lieu de l'arrestation qui informe le juge d’instruction. Le juge des libertés ordonne le transfèrement et si celui-ci ne peut être effectué immédiatement, le juge des libertés et de la détention en avise le juge mandant.


Régime commun aux mandats du juge d’instruction :

Règles communes aux mandats impliquant un recours à la force (d'amener, d'arrêt et de recherche, à l’exclusion du mandat de comparution donc) :  

  • L'agent chargé de l'exécution ne peut s'introduire dans le domicile d'une personne objet d’un mandat avant 6 heures ni après 21 heures (article 134 alinéa 1 du CPP). 

  • Il peut se faire accompagner d'une force suffisante pour que la personne ne puisse se soustraire à la loi (article 134 alinéa 2 du CPP). 

  • Et si la personne ne peut être appréhendée, un procès-verbal de perquisition et de recherches infructueuses est adressé au magistrat qui a délivré le mandat. La personne est alors considérée comme mise en examen pour l'application de l'article 176 relatif aux ordonnances de règlement (article 134 alinéa 3 du CPP).

  • Ces mandats mentionnent, outre la nature des faits imputés à la personne, leur qualification juridique et les articles de loi applicables (article 123 CPP).


Effet commun : Le juge d'instruction est tenu d'entendre comme témoin assisté ou de mettre en examen la personne contre laquelle il a été décerné un mandat de comparution, d'amener ou d'arrêt. Cette personne ne peut pas être mise en garde à vue pour les faits ayant donné lieu à la délivrance du mandat.


II. Le mandat décerné par le juge des libertés et de la détention : le mandat de dépôt

Article 122 dernier alinéa du CPP 


Condition : 

  • Il peut être décerné à l'encontre d'une personne mise en examen et ayant fait l'objet d'une ordonnance de placement en détention provisoire. 


Définition / effet : 

  • Il est l'ordre donné au chef de l'établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne à l'encontre de laquelle il est décerné. 


Attention - Compétence du JDL : Ce mandat est de la compétence exclusive du juge des libertés et de la détention puisqu’il est seul compétent pour ordonner une détention provisoire (depuis la loi du 15 juin 2000) afin de mieux préserver les libertés individuelles. Pour rappel, l’article 432-6 du Code pénal érige en infraction le fait, par un agent de l'administration pénitentiaire, de recevoir ou retenir une personne sans mandat, jugement ou ordre d'écrou établi conformément à la loi.

Remarque : Parfois, la juridiction de jugement est compétente pour ordonner un mandat de dépôt, au stade préalable au jugement. Par exemple, en matière de comparution immédiate, le tribunal peut, par décision spécialement motivée, placer ou maintenir le prévenu en détention provisoire (article 397-3 du CPP) lorsque l’affaire n’est pas jugée immédiatement.




Adélie JEANSON-SOUCHON



 

{1} Focus sur les phases de la procédure pénale publié sur notre site (disponnible sur : https://www.lespenalistesenherbe.com/post/focus-n-7-les-phases-de-la-procédure-pénale).


{2} Idem.


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