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Les phases de la procédure pénale

Dernière mise à jour : 26 nov. 2023

Ce focus a été publié pour la première fois le 14 mars 2023. Il a été écrit par Mme Juliette SUSSOT.


« La procédure pénale est « l’ensemble des règles qui définissent la manière de procéder pour la constatation des infractions, l’instruction préparatoire, la poursuite et le jugement des

délinquants » . Elle est régie quasi-exclusivement par le Code de procédure pénale. »


Définition : La procédure pénale est « l’ensemble des règles qui définissent la manière de procéder pour la constatation des infractions, l’instruction préparatoire, la poursuite et le jugement des délinquants »[1]. Elle est régie quasi-exclusivement par le Code de procédure pénale (C.proc.pén.).


Les cinq phases de la procédure : L’objectif de la procédure pénale est la recherche de la manifestation de la vérité. Elle se déroule en plusieurs temps. D’abord, l’enquête octroie à la police judiciaire des pouvoirs lui permettant d’établir l’existence ou l’absence d’une infraction, d’en rechercher les auteurs et d’en rassembler les preuves. Ensuite, se met en place le “procès pénal”, à condition que l’auteur de l’infraction découverte fasse l’objet de poursuites judiciaires. L’acte de poursuite constitue la deuxième phase de la procédure. Il résulte d’un choix opéré par le procureur de la République qui peut classer sans suite, mettre en œuvre une alternative aux poursuites ou poursuivre l’auteur (en déclenchant l’action publique). S’ouvre alors, éventuellement, une information préparatoire. Cette phase est obligatoire en matière criminelle et facultative en matière contraventionnelle et délictuelle. Elle a pour but de rassembler des éléments à charge et à décharge afin de décider s’il y a lieu, ou non, de présenter l’auteur présumé des faits devant une juridiction de jugement. Enfin, la dernière phase est dite de jugement. La juridiction de jugement statuera sur la culpabilité de la personne mise en cause. Si l’intéressé est déclaré coupable et qu’une peine est prononcée, celle-ci doit être exécutée.


N.B. : Il convient de souligner que le terme « procès pénal » ne désigne pas seulement la phase de jugement, bien qu’il soit majoritairement utilisé, en pratique, afin de traiter de l’audience de jugement. Ce terme recouvre en effet trois phases : les poursuites, l’instruction et le jugement.


L'enquête policière : la recherche des infractions pénales

La police judiciaire, chargée de constater l’infraction, d’en rassembler les preuves et d’en identifier les auteurs, a un rôle répressif. Elle mène les enquêtes et comprend notamment les officiers de police judiciaire (OPJ), les agents de police judiciaire (APJ) et les agents de police judiciaire adjoints (APJA).


Il existe, principalement, deux types d’enquête de police[2] : l’enquête préliminaire et l’enquête de flagrance. La première est l’enquête de police de droit commun. La seconde, parce qu’elle permet d’utiliser la coercition et qu’elle répond à une condition d’urgence, ne sera ouverte que si les conditions restrictives prévues par la loi sont réunies. En effet, en fonction de la nature de l’enquête de police, les pouvoirs des enquêteurs sont différents. Néanmoins, les actes d’enquête sont principalement les mêmes : perquisitions, opérations de surveillance, saisies de documents et données informatiques, placements en garde à vue… Seul le degré de coercition varie[3].


Pour qu’une enquête de flagrance soit ouverte, trois conditions doivent être réunies (art. 53 et 67 C.proc.pén.) :

  • Un critère de gravité : seuls sont concernés les crimes et les délits passibles d’une peine d’emprisonnement (ex, le délit de diffamation[4] ne fait encourir qu’une peine d’amende : art. 32, L. 29 juill. 1881) ;

  • Un critère temporel : le laps de temps séparant la commission de l’infraction et sa constatation par la police judiciaire doit être bref. Si aucun délai n’est précisé par la loi, la jurisprudence constante place le seuil à 48 heures.

  • Un critère d’apparence : les enquêteurs doivent disposer d’indices de la commission d’une infraction et non de simples soupçons (ex, le marquage d’un chien dressé pour la recherche de produits stupéfiants, devant la porte d’un appartement, permet de caractériser la flagrance : Crim., 11 déc. 2019)

En plus de ces critères légaux, il est possible de résumer la distinction comme suit : l’enquête préliminaire a pour objet la découverte d’une infraction éventuelle (ex, à la suite d’une dénonciation anonyme) alors que l’enquête de flagrance a pour objet de rassembler des éléments de preuve après que les OPJ ont relevé des indices caractérisant la (très) probable commission d’une infraction (ex, elle s’est commise sous leurs yeux ou la victime a porté plainte).


Aussi, si l’enquête de flagrance dure par principe 8 jours maximum (voire 16 jours, si le procureur de la République l’autorise), l’enquête préliminaire ne peut excéder deux ans (art. 75-3 C.proc.pén), depuis la loi du 22 décembre 2021. Toutefois, à la fin de l’enquête de flagrance ou si, au cours de celle-ci, les OPJ n’accomplissent pas un acte d’enquête par jour, la nature de l’enquête changera : l’enquête de flagrance basculera en enquête préliminaire. Le basculement peut également s’opérer dans le sens inverse. Si au cours d’une enquête préliminaire, les conditions permettant l’ouverture d’une enquête de flagrance, plus coercitive, sont réunies, la nature de l'enquête changera : l'enquête préliminaire basculera en enquête de flagrance (ex, si au cours d’une perquisition réalisée en enquête préliminaire, une infraction actuelle est découverte).


À l'issue de l’enquête, les enquêteurs transmettent les éléments de la procédure au procureur afin qu’il exerce l’opportunité des poursuites.


La poursuite des infractions pénales

Le déclenchement des poursuites est essentiellement confié au ministère public, par le biais de l’action publique (art. 1 C.proc.pén.). La mise en mouvement de l’action publique est destinée à obtenir une décision, de la juridiction de jugement, statuant sur la responsabilité pénale du mis en cause. Néanmoins, la compétence du procureur n’est pas exclusive. La partie civile pourra déclencher les poursuites en exerçant, devant le juge pénal, l’action civile (art. 2 C.proc.pén.). Il s’agit d’une action à finalité indemnitaire, visant la réparation du dommage causé par l’infraction[5].


S’agissant de l’action publique, le principe fondamental est la règle de l’opportunité des poursuites (art. 40-1 C.proc.pén.). Lorsque le Procureur a connaissance d’une infraction pénale, il peut, librement, décider de :

  • Ne pas poursuivre : il peut “classer sans suite” pour des raisons de droit (ex, prescription) ou de fait (ex, l’acte commis est de trop faible importance).

  • Mettre en place une alternative aux poursuites : si les conditions légales sont remplies, il peut choisir une voie médiane telles qu’une composition pénale, un avertissement pénal probatoire (ancien rappel à la loi), une convention judiciaire d’intérêt public pour les personnes morales (ex, les sociétés, les associations…), etc.

  • Poursuivre : il peut saisir une juridiction d’instruction ou une juridiction de jugement. Dans le premier cas, il rend un réquisitoire introductif afin de saisir une juridiction d’instruction. Dans le second cas, il saisit une juridiction de jugement par le biais de la citation directe, la convocation par procès-verbal, la comparution immédiate…


L’instruction des infractions pénales

Tout comme la phase d’enquête, la phase d’instruction ou d’information est en principe secrète (art. 11 C.proc.pén.). Cette phase est parfois obligatoire (en matière criminelle), souvent facultative (en matière contraventionnelle et délictuelle).


Un ou plusieurs juges d’instruction peuvent être saisis pour mettre en état l’affaire, soit par un réquisitoire introductif du procureur, soit par une plainte avec constitution de partie civile. Le Juge d’instruction (JI) ne pouvant pas s’auto-saisir, il n’instruit que les faits visés dans l’acte de saisine. Il a des pouvoirs d’investigation et peut décider de la mise en œuvre de perquisitions, d’écoutes téléphoniques, de mesures de géolocalisation, d’expertises, d’interrogatoires… Il a également des pouvoirs de décision notamment pour mettre en examen la personne mise en cause[6]. Toutefois, il ne peut pas décider d’un placement en détention provisoire. Il ne peut que le demander au Juge des libertés et de la détention (JLD), qui est le seul magistrat compétent pour statuer sur le prononcé de cette mesure de contrainte[7].


Lorsque l’instruction lui paraît terminée, le JI communique le dossier au procureur et aux parties, afin qu’ils formulent leurs observations, dans le respect du contradictoire. À l'issue de cette phase, il rend une ordonnance de clôture :

  • L’ordonnance de non-lieu peut être motivée en droit (ex, prescription) ou en fait (ex, l’auteur de l’infraction demeure inconnu) ;

  • L’ordonnance de renvoi saisit le tribunal de police ou le tribunal correctionnel ;

  • L’ordonnance de mise en accusation saisit la Cour d’Assises ou la Cour criminelle départementale.

Cette phase obéit à la règle du double degré de juridiction. Les parties et le procureur peuvent interjeter appel des ordonnances rendues par le JI et par le JLD devant la Chambre de l’instruction.


Le jugement des infractions pénales

À l'issue de l’enquête ou de l’instruction, la juridiction de jugement statue sur la responsabilité pénale de la personne visée dans l’acte de saisine. Cette phase est par principe publique, sauf quand le huis clos est de droit ou qu’il peut être demandé (ex, l’auteur est mineur, l’affaire est sensible pour l’ordre public…). La compétence matérielle de la juridiction de jugement dépend du quantum de la peine encourue[8].


La juridiction de proximité, créée par une loi de 2002 et supprimée par une loi de 2011, avait pour objet de décharger les tribunaux de police.


Le tribunal de police est compétent en matière contraventionnelle afin de relaxer ou de condamner un prévenu. Il statue à juge unique.


Le tribunal correctionnel est compétent en matière correctionnelle afin de relaxer ou de condamner un prévenu. Statuant, par principe, en formation collégiale, il peut statuer à juge unique.


La Cour d’Assises et la Cour criminelle départementale sont compétentes en matière criminelle afin d’acquitter ou de condamner un accusé. Par principe collégiales, la première est composée, en première instance, de trois magistrats professionnels et d’un jury populaire[9] tandis que la seconde est composée de cinq magistrats professionnels. La Cour criminelle départementale est compétente, uniquement, pour les crimes faisant encourir quinze ou vingt ans de réclusion et si certaines conditions sont réunies (la majorité de l’auteur, l’absence d’état de récidive…).


Ces juridictions statuent en premier ressort : un appel peut être interjeté afin que l’affaire soit à nouveau jugée. En matière contraventionnelle et correctionnelle, la Chambre des appels correctionnels de la Cour d'appel est compétente. En matière criminelle, la Cour d'Assises connaîtra de l'appel formé contre l’arrêt rendu par une Cour d’Assises ou une Cour criminelle départementale.


Contre les décisions rendues en dernier ressort par une juridiction d’appel, un pourvoi en cassation peut être formé. La chambre criminelle de la Cour de cassation examinera l’affaire uniquement en droit. Alors, en droit interne, l’éventuelle décision de la chambre criminelle marque la fin de la procédure pénale.


L’exécution des peines

Reste que si une peine a été prononcée, elle doit être exécutée c’est-à-dire que la personne condamnée doit payer l’amende au Trésor Public et/ou effectuer la peine de prison ferme. L’exécution de la peine privative ou restrictive de liberté est effectuée par le parquet. Dans les grands tribunaux, il s’agit du parquet de l’exécution des peines. Le Juge de l’application des peines (JAP) et le Tribunal de l’application des peines (TAP) sont ensuite compétents pour l’application de la peine, une fois la mise à exécution faite par le parquet. L’appel des décisions rendues par les juridictions d’application des peines du premier degré (JAP et TAP) est porté devant la Chambre de l’application des peines (ChAP).


Juliette SUSSOT


Schéma focus n°7
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[1] Lexique des termes juridiques, 2017-2018, Dalloz


[2] Il existe également des enquêtes dites sui generis conformément aux articles 74 et suivants du Code de procédure pénale. Elles sont assimilées à la flagrance en ce qu’elles en suivent le régime : tel est le cas de l’enquête de mort suspecte, de l’enquête de recherche d'une personne disparue et de l’enquête de recherche d'une personne en fuite.


[3] Il convient de noter qu’en cas d'enquête portant sur des faits relevant de la criminalité ou de la délinquance organisée, un régime dérogatoire s’applique par rapport aux règles relatives à l'enquête de droit commun, y compris l'enquête préliminaire. Des actes plus intrusifs sont permis soit parce que les règles sont aménagées (comme par exemple s’agissant de la perquisition, de la garde à vue…), soit parce que d’autres actes d’investigation sont autorisés (comme par exemple l’infiltration, la sonorisation…)


[4] Art. 29 L. 29 juil. 1881 : « Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ».


[5] Voir à propos de l’action civile, l’article sur notre site « La victime, grande oubliée du procès pénal ? »


[6] Voir à propos de la mise en examen, le focus n°5


[7] Voir à propos des mesures de contraintes pendant l’instruction, le focus n°6


[8] Voir à propos de la distinction entre les contraventions, les délits et les crimes, le focus n°2


[9] Voir à propos de la Cour d’Assises, le focus n°3


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