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Distinction entre viol, agression sexuelle et atteinte sexuelle

Photo du rédacteur: Les Pénalistes en HerbeLes Pénalistes en Herbe

Dernière mise à jour : il y a 16 minutes




Les infractions sexuelles constituent l’un des domaines qui a le plus évolué depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal. Il en résulte une multiplication du nombre d’infractions relevant de cette catégorie. Leurs définitions et leur articulation peuvent se montrer particulièrement complexes. La présente série a vocation à présenter de manière synthétique l’état du droit en la matière. Pour ce faire, il apparait nécessaire de commencer par présenter, de manière synthétique, les infractions existantes (article 1), avant d’exposer de la manière la plus didactique possible la distinction entre les trois grandes infractions de viol, d’agression sexuelle et d’atteinte sexuelle (article 2). Enfin, un retour sur l’évolution contemporaine de ces infractions permettra d’aller plus loin et de mieux comprendre l’état actuel du droit (article 3).


Le deuxième article de cette série a vocation à présenter les éléments constitutifs des infractions de viol, d’agression sexuelle, et d’atteinte sexuelle, afin de réussir à mieux les distinguer, et à restituer aux faits d’une espèce leur exacte qualification pénale. Cet article se veut concret, et de droit positif. Seront envisagées les multiples subtilités techniques qui se sont ajoutées au fur et à mesure des années, sans évoquer la question des peines, qui alourdirait le propos et qui est présentée de façon plutôt accessible par le Code.

A titre liminaire, il convient de rappeler que le viol est une catégorie particulière d’agression sexuelle (au sens générique). Le viol est constitué en présence d’un acte de pénétration sexuelle ou un acte bucco-génital commis sur l’auteur ou sur la victime, tandis que l’agression sexuelle (au sens strict) est une qualification subsidiaire, qui s’applique lorsqu’il y a un contact sur une zone sexuelle du corps[1] mais sans pénétration ou acte buccogénital. Lorsque le viol ou l’agression sexuelle ne peuvent être caractérisés (en l’abscence de violence, contrainte, menace, surprise, ou d’un autre cas prévu par la loi), il y a lieu de s’interroger sur l’atteinte sexuelle. 


Nous suivrons l’ordre de spécificité des infractions pour les examiner et nous évoquerons donc successivement le viol (I), l’agression sexuelle (II) et l’atteinte sexuelle (III). Un schéma récapitulatif en fin d’article permet de visualiser plus clairement l’articulation de ces différentes infractions.


Préalable important : Pour bien distinguer les différentes infractions sexuelles impliquant un contact physique, il faut savoir ce qu’est, au sens de la loi pénale, un “mineur de 15 ans”. En effet, ce seuil de 15 ans permet de caractériser certaines infractions, ou de simplifier une telle caractérisation, en ôtant d’autres conditions. 

Au sens de la loi pénale, le mineur de 15 ans est le mineur âgé de moins de 15 ans, qui a entre 0 et 14 ans et 364 jours donc. Le mineur âgé de 15 à 18 ans n’est donc pas un mineur de 15 ans.


I – Caractérisation du viol

Précision liminaire : Le viol nécessite d’être en présence de deux personnes a minima[2]. La loi ne précise pas l’âge de l’auteur ni de la victime, ni leur genre, ni les liens qui les unissent. Dès lors, la loi ne distinguant pas, il n’y a pas lieu de distinguer et il faut considérer que le viol peut être commis entre toutes personnes : entre mineurs (s’appliqueront alors les règles relatives à leur discernement et leur aptitude à la sanction[3]), d’un majeur sur un mineur mais aussi d’un mineur sur un majeur, ou encore de personne unies par les liens du mariage[4].

L’aticle 222-23 du Code pénal prévoit que “Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d'autrui ou sur la personne de l'auteur par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol.” Il s’agit ici du viol “classique”. Les articles 222-23-1 et 222-23-2 prévoit des variantes : en raison d’un écart d’âge ou d’une relation familiale, la violence, contrainte, menace ou surprise n’est plus exigée (cf. infra).


1 - L’élément matériel 

a - L’existence d’un acte sexuel, condition indispensable

L’acte sexuel constitutif du viol était initialement constitué par la pénétration sexuelle de la victime. Depuis 2018[5], la pénétration sexuelle de l’auteur par la victime est aussi réprimée. La loi de 2021[6] est venue ajouter à la notion de pénétration celle d’acte bucco-génital.

L’acte de pénétration est réprimé “de quelque nature qu’il soit” (et donc peu importe le genre de la victime ou l’orifice concerné). Encore faut-il que cette pénétration soit “sexuelle”[7]. Les juges ont avec le temps assoupli cette exigence en ne se limitant pas à la pénétration d’un sexe par un sexe, mais en incluant des actes de pénétration digitale, ou de pénétration par des objets dans un contexte sexuel. La jurisprudence apprécie in concreto la connotation sexuelle de l’acte en fonction des circonstances et de l’objet pénétrant notamment[8].


Depuis 2021, tout acte bucco-génital permet de satisfaire à cette condition de l’acte sexuel constitutif du viol[9].


b - L’existence d’un défaut de consentement, condition de principe

Le principe : L’existence d’une violence, contrainte, menace, ou surprise

L’existence d’une violence, contrainte, menace, ou surprise est parfois résumée comme une “absence de consentement”. Mais selon la majorité de la doctrine, si la violence, contrainte, menace ou surprise font effectivement obstacle au consentement, il ne va pas de soi que toute absence de consentement entre dans une de ces quatre conditions alternatives. En effet, l’auteur doit exercer un comportement positif sur la victime et avoir l’intention d’exercer sur la victime une violence, contrainte, menace ou surprise.

Focus sur la notion de contrainte morale : 

L’article 222-22-1, introduit dans le Code pénal en 2018 précise aujourd’hui les conditions dans lesquelles la contrainte morale peut être retenue. Sa rédaction actuelle est la suivante : “Lorsque les faits sont commis sur la personne d'un mineur, la contrainte morale mentionnée au premier alinéa du présent article ou la surprise mentionnée au premier alinéa de l'article 222-22 peuvent résulter de la différence d'âge existant entre la victime et l'auteur des faits et de l'autorité de droit ou de fait que celui-ci a sur la victime, cette autorité de fait pouvant être caractérisée par une différence d'âge significative entre la victime mineure et l'auteur majeur”. Cet alinéa ne modifie pas réellement l’état du droit mais clarifie la définition de la contrainte morale en précisant les éléments que le juge peut prendre en compte pour établir la contrainte, tout en préservant son pouvoir d’interprétation[10].

L’alinéa suivant dispose “Lorsque les faits sont commis sur la personne d'un mineur de quinze ans, la contrainte morale ou la surprise sont caractérisées par l'abus de la vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes.” Cet alinéa ambigu, dans une interprétation large, pourrait faire perdre toute utilité à l’infraction d’atteinte sexuelle (cf infra) en indiquant qu’un mineur de 15 ans ne peut jamais “consentir”. En réalité, la plupart des auteurs de doctrine considèrent que cet alinéa ne concerne que les mineurs « ne disposant pas du discernement nécessaire [11].», notion souverainement appréciée par les juges, qui n’est pas automatiquement déduite de l’âge (moins de 15 ans). 

Notons d’ailleurs que ces dispositions ayant le caractère de textes interprétatifs, elles s’appliquent aussi aux faits commis antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 3 août 2018[12].


L’exception : l’absence de violence, contrainte, menace, ou surprise

Par exception, depuis la loi du 21 avril 2021, en cas de viol assimilé ou de viol incestueux, la preuve d’une violence, contrainte, menace ou surprise n’est plus exigée. 

Ainsi, en matière de viol assimilé lorsqu’une victime a moins de 15 ans, que l’auteur est majeur, et que la différence d’âge entre les deux protagonistes est d’au moins 5 ans, le viol est constitué sans qu’il soit nécessaire de qualifier une violence, contrainte, menace ou surprise (article 222-23-1 du Code pénal). Il sera toutefois nécessaire de prouver que l’auteur connaissait l’âge de la victime ou savait que la différence d’âge était d’au moins 5 ans.


Nota Bene : Cette différence d’âge de 5 ans est couramment appelée la “clause Roméo et Juliette”. Elle vise à exclure de l’incrimination de viol ou d’agression sexuelle les “amours de jeunesse” entre des adolescents, proches en âge, qui deviendraient prohibées par la loi pénale au moment où le plus âgé deviendrait majeur. Compte tenu de la durée choisie, 5 ans, un seul cas est visé : une relation entre un mineur de 14 ans et un majeur de 18 ans[13].


Attention toutefois, il convient de garder à l’esprit qu’une relation entre un majeur, quel que soit son âge, et un mineur de 15 ans, tombe toujours sous le coup d’une infraction puisque même si la différence d’âge est inférieure à 5 ans, l’atteinte sexuelle est applicable (voir schéma Relation entre un majeur et un mineur).

Remarque : en matière de recours à la prostitution, il n’est pas nécessaire de démontrer une différence d’âge d’au moins 5 ans lorsque le mineur a moins de 15 ans. En effet, l’article 222-23-1 du Code pénal prévoit que “La condition de différence d'âge prévue n'est pas applicable si les faits sont commis en échange d'une rémunération, d'une promesse de rémunération, de la fourniture d'un avantage en nature ou de la promesse d'un tel avantage”.


De la même manière, en matière de viol incestueux, la loi prévoit que lorsque l’acte est réalisé par un majeur sur un mineur “lorsque le majeur est un ascendant ou toute autre personne mentionnée à l'article 222-22-3 ayant sur le mineur une autorité de droit ou de fait” (article 222-23-2 du Code pénal). La question de la violence, contrainte, menace, surprise ne se pose plus non plus.


2 - L’élément moral

Le dol général en matière de viol “classique” : Le viol faisant partie des infractions intentionnelles, un dol général devra être démontré. Il faudra donc prouver que l’auteur avait la volonté de réaliser un certain acte sexuel (pénétration ou acte bucco-génital) tout en ayant conscience de le commettre avec violence, contrainte, menace ou surprise. Si cette condition est parfois remplie de manière évidente, il arrive dans d’autres cas, qu’elle pose difficulté, notamment en cas de contrainte morale ou de surprise, lorsque le comportement de la victime était ambigu et pouvait laisser penser qu’elle consentait à l’acte (par exemple si l’auteur n’avait pas connaissance de l’état avancé d’alcoolisation d’une victime, ou la femme qui accepte d’avoir des relations sexuelles croyant avoir à faire à son mari, bien que cette question ait été tranchée en jurisprudence).

Le dol général en matière de viol assimilé ou de viol incestueux : L’auteur doit avoir conscience d’avoir la qualité requise (relation familiale notamment) pour se voir reprocher un viol incestueux. Mais la difficulté se pose surtout en matière de viol assimilé puisqu’il faut prouver que l’auteur connaissait l’âge de la victime ou savait que la différence d’âge était d’au moins 5 ans. Si cette condition ne fait pas difficulté pour des très jeunes mineurs, en présence d’un mineur qui peut avoir l’apparence d’un mineur plus âgé par exemple, la difficulté peut apparaître. Aussi, si la difficulté à prouver l’élément matériel de la violence, contrainte, menace ou surprise disparaît au titre de l’élément matériel, apparaît une nouvelle difficulté au niveau de l’élément moral.

Nota Bene : rappelons à toutes fins utiles que les mobiles de l’infraction sont indifférents à la caractérisation de l’infraction. C’est ainsi que les “motivations pseudo pédagogiques” avancées par l’auteur des faits pour justifier ses gestes, ne sauraient en aucun cas constituer un obstacle à la répression. 


II – Caractérisation de l’agression sexuelle

L’article 222-27 prévoit que “Les agressions sexuelles autres que le viol sont punies (...)”. En cela, il s’agit d’une qualification retenue par défaut lorsque le viol n’est pas applicable, pour laquelle de nombreux renvois seront faits au viol puisque l’article 222-22 qui ouvre la section du Code prévoit que “Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur”. Cet article est donc commun au viol et à l’agression sexuelle. La seule chose qui diffère du viol, c’est la nature de l’acte sexuel.


1 – Eléments constitutifs
A - L’élément matériel 

a - Un acte “d’atteinte sexuelle”

L’article 222-22 du Code pénal emploie un vocable qui peut pour le moins semer la confusion : “Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle (...)”, alors que l’atteinte sexuelle constitue elle-même une infraction à part entière (cf. infra). Une définition plus concrète aurait pu être souhaitée, d’autant que cette notion est empreinte d'ambiguïté : faut-il s’en tenir aux seuls organes sexuels, ou inclure d’autres parties du corps qui peuvent avoir une connotation sexuelle (bouche, fesses, seins, cuisses, etc.) ? 


Malgré cela, dans deux arrêts[14], la Cour de cassation refuse de transmettre une QPC sur la conformité à la Constitution de l’article 222-22 du Code pénal, qui, selon elle, satisfait à l’exigence de clarté et de précision du texte “dès lors que l'interprétation de [cet article], qui définit de manière suffisamment claire et précise le délit d’agression sexuelle, entre dans l’office du juge pénal”. 


La jurisprudence a pu préciser au fur et à mesure ce qu’il fallait entendre par “atteinte sexuelle” : il s’agit d’un “acte impudique exercé sur le corps d’une victime à l’exception du viol[15]. Un contact corporel avec la victime est exigé de manière constante par la jurisprudence. Cet acte impudique est le plus souvent caractérisé par des caresses, des attouchements sur des zones sexuelles du corps mais peut aussi être caractérisé par des baisers[16]


Cette affirmation de l’implication d’une “zone sexuelle du corps” doit être relativisée depuis un arrêt de 2021[17] dans lequel la Cour de cassation a admis que “les caresses avaient un caractère sexuel en raison de la manière dont elles ont été effectuées et du contexte dans lesquels les faits se sont déroulés”. En l’espèce, un homme avait caressé une fillette sur la main et au niveau du mollet, tout en se masturbant après avoir ouvert sa braguette. La Cour de cassation s’en remet à l’appréciation des juges du fond qui avait estimé que ces zones, “sans être spécifiquement sexuelles en elles-mêmes, ont été de nature à exciter le prévenu au niveau sexuel alors que l’enfant n’avait ni la maturité ni le pouvoir de s’opposer de manière efficiente à ces attouchements de nature sexuelle”.


b - L’existence d’un défaut de consentement, condition de principe

Renvoi aux développements sur le viol. L’agression sexuelle “classique” nécessite l’existence d’une violence, contrainte, menace ou surprise. L’agression sexuelle “assmilée” et “incestueuse” fonctionnent sur le même modèle que pour le viol.


B - L’élément moral

L’élément moral fonctionne de la même manière que pour le viol : 


En matière d’agression sexuelle “classique”, il faut la volonté d’exercer un acte impudique sur le corps de la victime en ayant conscience de le commettre avec violence, contrainte, menace ou surprise. 


En matière d’agression sexuelle “assimilée” ou “incestueuse”, il faut établir la conscience de la différence d’âge d’au moins 5 ans ou la conscience d’avoir la qualité requise (relation familiale).


III - Caractérisation de l’atteinte sexuelle

L’atteinte sexuelle constitue un domaine résiduel : ce n’est que lorsque le viol ou l’agression sexuelle ne sont pas constituée qu’il y a lieu d’examiner l’atteinte sexuelle (article 227-21-1 du Code pénal[18]). Autrement dit, en présence d’une violence, contrainte, menace ou surprise, l’atteinte sexuelle n’est pas applicable et doit laisser place aux infractions de viol et d’agression sexuelle. 


Hors, depuis que la loi de 2021 a mis en place les infractions de viol / agression sexuelle incestueux ou assimilés, le domaine de l’atteinte sexuelle se ressère. Au point que certains s'interrogent sur sa suppression afin d’ajouter de la clarté.

Il existe deux types d’atteintes sexuelles : l’atteinte sexuelle “classique”, sur mineur de 15 ans (article 227-25) et l’atteinte sexuelle sur mineur d’au moins 15 ans (article 227-27 du Code pénal). 


A – Eléments constitutifs de l’atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans (article 227-25)

1 - Conditions préalables

L’auteur doit être majeur, et le mineur doit avoir moins de 15 ans dans cette hypothèse.


2 - Elément matériel

Il faut un acte impudique quelle que soit sa nature. Le texte renvoie à la notion d’atteinte sexuelle, autrement dit de contact avec une zone sexuelle du corps (caresses ou baisers). Toutefois, le texte ne distingue pas pour l’atteinte sexuelle selon que l’acte constitue une pénétration ou un acte bucco-génital (pour rappel, pour l’agression sexuelle au sens strict, le code prévoit “hors les cas de viol ; il n’y a pas ici de telle précision). Aussi, l’atteinte sexuelle peut être constituée y compris en présence d’une pénétration. 


Nota bene : Pour distinguer le viol assimilé et l’atteinte sexuelle, c’est le principe du choix de la plus haute expression pénale qui s’applique : si le viol peut être caractérisé (différence d’âge d’au moins 5 ans ou prostitution), c’est le viol qui devra être retenu.


3 - Elément moral

Il faut établir que la personne avait la volonté de commettre l’acte réprimé par la loi. Cela induit donc que l’auteur devait avoir connaissance de l’âge de la victime et qu’en l’absence de connaissance de son âge exact, il pourra se prévaloir de sa bonne foi, en fonction des circonstances (mineur paraissant plus âgé par exemple). 


B – Eléments constitutifs de l’atteinte sexuelle sur mineur âgé de 15 ans ou plus (article 227-25)

1 - Conditions préalables

Il faut un auteur majeur et un mineur, âgé d’au moins 15 ans dans cette seconde hypothèse.


En principe, l’atteinte sexuelle sur le mineur âgé d’au moins 15 ans n’est pas punissable. Toutefois, le Code prévoit une répression lorsque l’atteinte sexuelle est commise sur un mineur plus âgé par un majeur qui a sur la victime ou une autorité de droit ou de fait, ou par une personne majeure qui abuse de l’autorité que lui confère ses fonctions. C’est cette autorité qui justifie la répression.

Rappel : il ne doit pas y avoir viol ou agression sexuelle. Aussi, avec l’hypothèse du viol incestueux sur le mineur âgé d’au moins 15 ans, l’atteinte sexuelle sur le mineure d’au moins 15 ans voit son domaine extrêmement limité et ne sera plus applicable que dans le cas où le majeur ne répond pas aux qualités de l’article 222-22-3 du Code pénal (qui prévoit la liste des personnes de la famille pour lesquelles la relation est considérée comme incestueuse). Tel pourrait être le cas par exemple d’un animateur de colonie de vacances ou d’un professeur. Attention toutefois : si l’autorité de droit ou de fait permet de caractériser une contrainte, alors, il y aura lieu de retenir le viol ou l’agression sexuelle. 


2 - Elément matériel

Renvoi aux développements sur l’atteinte sexuelle “classique” (sur mineur de 15 ans)


3 - Elément moral

Il faut prouver que l’auteur est conscient qu’il a une autorité sur la victime, et qu’il sait que cette dernière est mineure.


Conclusion

Depuis les modifications récentes, la distinction entre le viol et l’agression sexuelle d’un côté, et l’atteinte sexuelle de l’autre se trouble, et le domaine résiduel de l’atteinte sexuelle devient particulièrement mince. Concrètement, il n’y a plus que 3 cas d’atteinte sexuelle (rappelons que dans tous les cas, la violence, contrainte, morale ou surprise n’est pas caractérisée sinon il y a viol ou gression sexuelle) :

  • Pas d’inceste ni d’autorité de droit ou de fait avec mineur de 14 ans et auteur de 18 ans (art. 227-25)

  • Pas d’inceste mais autorité de droit ou de fait avec mineur de 14 ans et auteur de 18 ans (art. 227-26)

  • Pas d’inceste mais autorité de droit ou de fait avec mineur d’au moins 15 ans et majeur (art. 227-27)

Encore faut-il que les éléments de l’espèce ne permettent pas de caractériser une contrainte morale de sorte à faire basculer vers la qualification de viol ou d’agression sexuelle…


Adélie JEANSON-SOUCHON



[1] En principe car dans un arrêt Crim 3 mars 2021 : la Cour de cassation a admis que “les caresses avaient un caractère sexuel en raison de la manière dont elles ont été effectuées et du contexte dans lesquels les faits se sont déroulés”, alors qu’elles n’avaient pas été effectuées sur des zones sexuelles du corps (cf. infra).

[2] On peut ajouter qu’a priori, la victime doit être vivante (Crim 13 juillet 1965), car l’infraction est classée dans les crimes et délits contre les personnes. Si la victime est décédée et que l’auteur en a connaissance, il conviendra de le poursuivre sur le fondement de l’atteinte à l’intégrité du cadavre. Il est toutefois raisonnable de penser que la solution de l’arrêt Perdereau (Crim 16 janvier 2026) ayant utilisé la théorie de “l’infraction impossible” en matière d’homicide volontaire (victime déjà décédée) serait transposable en la matière. Ainsi, si l’auteur croit la victime vivante mais endormie par exemple, la tentative de viol pourra être constituée.

[3] Voir à ce sujet notre focus sur la responsabilité pénale des mineurs, rédigé par J. SUSSOT pour l’association Les pénalistes en herbe, https://www.lespenalistesenherbe.com/post/la-responsabilit%C3%A9-p%C3%A9nale-des-mineurs 

[4] D’abord reconnu en jurisprudence (Cass Crim,5 septembre 1990 et Crim 11 juin 1992), le viol conjugal a ensuite été consacré par la loi du 4 avril 2006 à l’article 222-22 alinéa 2 du Code pénal

[5] LOI n° 2018-703 du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes

[6] LOI n° 2021-478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste

[7] Voir par exemple Cass crim 21 février 2007 : n’est pas constitutif de viol le fait de pénétrer la bouche de la victime par un objet représentant un sexe masculin (en raison de l’absence d’organe sexuel pénétrant ou pénétré).

[8] Cass crim 27 avril 1994, Cass crim 27 avril 1994 (pénétrations anales digitales et à l’aide de carottes), Cass crim 6 décembre 1995 (pénétration par le manche d’une pioche recouvert d’un préservatif).

[9] Depuis 2018, la fellation pratiquée sur l’auteur était déjà réprimée. L’ajout de 2021 vise donc essentiellement le cunnilingus mais aussi les contact entre la bouche et un sexe masculin sans pénétration.

[10] Le texte précise donc “certaines circonstances sur lesquelles le juge pénal peut s’appuyer pour établir la contrainte morale lorsqu’elle est commise sur un mineur, et d’ajouter que ces circonstances peuvent également permettre d’établir la surprise. Le pouvoir d’appréciation du juge est donc toujours intactDroit pénal spécial, Valérie Malabat, DALLOZ, Hypercours, 2022

[11] En ce sens : Droit pénal spécial, Emmanuel dreyer, LGDJ, 2023 et Droit pénal spécial, Valérie Malabat, DALLOZ, Hypercours, 2022 [12] Cass Crim 17 mars 2021 n°20-86.318, et dans le même sens pour une version du texte applicable entre 2010 et 2018 : Décision n° 2014-448 QPC du 6 février 2015 M. Claude A. [Agression sexuelle commise avec une contrainte morale - Conformité]

[13] Crim 21 octobre 1998

[14] Crim 7 aout 2013 et Crim 3 octobre 2012

[15] Crim 20 juin 2001, Crim 10 janvier 2007

[16] Crim 19 juin 2019

[17] Crim 3 mars 2021 [18] Article 227-21-1 : Les infractions de nature sexuelle pouvant être commises sur des mineurs sont prévues au présent paragraphe, sans préjudice des dispositions de la section 3 du chapitre II du présent titre réprimant les viols, les agressions sexuelles, l'inceste, l'exhibition sexuelle et le harcèlement sexuel, qui peuvent être également commis au préjudice de victimes mineures.

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