top of page

Prévenir le crime : réalité ou utopie ?

Dernière mise à jour : 8 déc. 2023



La France, comme d’autres pays, connait un problème de surpopulation des établissements carcéraux. Cela est notamment du à un fort taux de récidivistes. En effet, près de 40% des détenus entre 20 et 30 ans récidivent selon le ministère de la Justice. De plus, selon le site justice.gouv, 61% des sortants de prison sont réincarcérés dans les 5 ans.


La récidive est le fait de commettre une infraction de même nature dans un certain délai. Par exemple, quelqu’un qui a commis le délit de vol sera considéré comme récidiviste s’il commet de nouveau un acte de vol dans les 5 ans suivant le premier. Ainsi, afin de lutter contre la criminalité, et plus précisément contre la récidive, la criminologie[1] propose des méthodes. Mais celles-ci sont-elles vraiment efficaces ?

"Les conditions de vie en prison ont pour conséquences que, certaines personnes, apprennent à vivre et à se comporter de façon incompatible avec la société".

La prison ou l’école du crime : Le fait que le taux de récidive soit élevé peut s’expliquer par les effets de l’incarcération sur les prisonniers. En effet, les conditions de vie en prison ont pour conséquences que, certaines personnes, apprennent à vivre et à se comporter de façon incompatible avec la société. Il s’agit de lieux où souvent la violence règne, où la réponse adaptée à un conflit, selon une partie des détenus, est soit de porter des coups, soit d’insulter. Ainsi, les personnes peuvent acquérir des automatismes qui ne sont pas tolérables dans la société. S’il est vrai que cela ne concerne pas tous les détenus, ce facteur peut quand même expliquer un taux de récidive important, mais il n’est pas le seul.


Lors de leur détention, les personnes peuvent perdre leur emploi et donc leur source de revenu. De plus, même s’il est possible de travailler en prison, l’administration pénitentiaire n’est pas obligée de procurer du travail à ses détenus et si elle le fait, cela est peu rémunéré. En effet, la rémunération horaire est d'1,58€ en moyenne, alors que le SMIC est de 10,03€[2]. Cela ne permet pas d’économiser pour le retour à la liberté. Egalement, cet argent peut être utilisé pour indemniser les victimes.


A cela, s’ajoute le fait que les détenus peuvent perdre leur logement, voire leur « réputation » mise à mal sur les réseaux sociaux, avoir des tensions au sein de leur famille du fait de leur incarcération…


Tous ces facteurs font que la réinsertion sociale de ces personnes vont être difficiles à leur sortie de prison. Leur difficulté à se réinsérer, qui va se corréler avec la difficulté de trouver un emploi, va faire qu’ils vont avoir des besoins financiers importants. Malheureusement, dans cette situation de détresse, la seule solution possible semble être la commission d’infraction. C’est pour cela que des propositions sont faites pour éviter la récidive et ainsi prévenir le crime. En conséquent, l’Etat met de plus en plus en place des peines alternatives à la prison afin du lutter contre ce phénomène de récidive, ainsi que des suivis personnalisés inspirés par la criminologie.


Le rôle important des "SPIP" dans la lutte contre la récidive : Selon la criminologie, dans un aspect sociologique, si une personne commet une infraction c’est qu’elle est inadaptée à la société et donc dangereuse. Ainsi, il faut mettre en place un accompagnement des détenus, des mesures de suivi afin de les ré adapter à la société. En conséquence, cela faciliterait la réinsertion de ceux-ci et en étant insérés dans la société, les risques de récidive sont plus faibles.


Pour cela, une méthode thérapeutique est envisageable. D’ailleurs, elle est mise en place en France via les SPIP (Service Pénitentiaires d’Insertion et de Probation), composés principalement d’agents de probations qui interviennent pendant l’incarcération des détenus. Ce service propose un accompagnement ainsi qu’un suivi des personnes détenues. Cela est nécessaire afin de pouvoir les aider à se réinsérer dans la société. Pour cela, ils doivent « évaluer » les délinquants le plus tôt possible après leur admission dans un centre pénitentiaire, et ce, afin de déterminer le niveau d’aide dont ils ont besoin.

"Moins la personne est insérée dans la société, plus elle aura besoin d’aide.

Leurs missions consistent à analyser l’inconscient et déterminer l’état de dangerosité de tous les délinquants. Les agents de probation doivent pouvoir agir sans aucune limite afin que leurs interventions soient efficaces. Leur domaine d’intervention dépendra, cependant, de la personnalité du délinquant et non de sa dangerosité, notamment s’il est inséré ou non dans la société. Plus la personne est insérée dans la société moins elle aura besoin que du temps lui soit consacré. A contrario, moins la personne est insérée dans la société, plus elle aura besoin d’aide.

Afin que cet accompagnement soit efficace, il faut abandonner l’idée de punir le délinquant pour se concentrer sur l’aide qui doit lui être apportée. Celui-ci purge déjà une peine et pour qu’elle soit efficace, il faut qu’il puisse se réinsérer dans la société. Dès lors, il est nécessaire que l’agent de probation obtienne la confiance du délinquant. Pour cela, il doit adopter un certain comportement. Il faut que le délinquant ne se sente pas jugé afin qu’il puisse se confier pour qu’ensuite, il écoute les conseils qui lui sont donnés. Par conséquent, l’agent doit veiller à son comportement verbal, doit avoir un ton chaleureux, compréhensif, optimiste, il doit être courtois, poli. L’agent doit également faire attention à son comportement non verbal, notamment aux expressions de son visage qui doivent donner des signes d’approbation et d’écoute.


Pour finir, suite aux différents entretiens menés, l’agent de probation doit être en mesure de proposer des solutions efficaces à la réinsertion du délinquant dans la société. Cela peut consister en une formation, offre d’emploi, proposition de logement.. Cela se retrouve également ailleurs, sous la forme de programmes au sein des centres pénitenciers. Ces programmes, peuvent proposer des formations mais également des traitements contre la toxicomanie, l’alcoolisme…


Des méthodes de prévention du crime mises en place par les particuliers : A côté de l’aide apportée par les professionnels, via des méthodes prônées par la criminologie, des particuliers essayent eux aussi d’apporter leurs aides aux délinquants afin que ceux-ci se réinsèrent dans la société et par conséquent, ne retournent pas en prison. Des initiatives sont surtout prises par d’anciens détenus, qui confrontés à la difficulté de se réinsérer, proposent des solutions afin que leurs camarades ne soient pas sujets aux mêmes difficultés[3].

"Bien souvent, les détenus n’ont aucune formation, d’où leur difficulté à trouver un emploi à leur sortie de prison."

Des particuliers donnent également leur chance à des détenus, comme par exemple Marseille solutions. Cet organisme a ouvert le restaurant les « Beaux Mets », géré par les détenus de la prison des Baumettes. En effet, ceux-ci, dans le cadre d’une formation, cuisinent plusieurs fois par semaine. Cela leur permet d’apprendre un métier qu’ils pourront exercer une fois sortie de prison. Ainsi, ils diminuent le risque de récidiver et augmentent leur chance de trouver un emploi. En effet, bien souvent, les détenus n’ont aucune formation, d’où leur difficulté à trouver un emploi à leur sortie de prison.

Malheureusement, ces initiatives restent rares, ce qui rend la prévention du crime utopique..


Une prévention du crime utopique ? Ces méthodes, afin de prévenir le crime, qu’elles soient mises en oeuvre à l’aide de l’Etat ou des particuliers, sont honorables et donnent une lueur d’espoir à la diminution du taux de récidive. Cependant, cela n’est pas suffisant et peut poser des difficultés en terme d’efficacité.

Tout d’abord, il y a des difficultés liées au manque de personnel dans les SPIP. En France, chaque conseiller d'insertion et de probation est responsable de 80 à 180 dossiers de condamnés. Ainsi, les agents de probations ne sont pas dans la mesure d’accorder le temps nécessaire pour pouvoir aider chaque détenu. Cependant, l’Etat essaye de prendre des initiatives pour remédier à ce problème mais cela reste insuffisant . Par exemple, le budget voté pour 2020 prévoit 400 emplois supplémentaires dans les SPIP, alors qu’en 2017, il était question de 1000 postes.


A ce manque de personnel s’ajoute le manque de moyens financiers. Cela se répercute dans le choix des programmes proposés en prison qui, de ce fait, sont limités. Dès lors, en pratique, les aides au logements, formations sont peu accessibles. Ce manque de moyens financiers s’explique notamment par la politique financière de l’Etat qui est davantage tourné vers l’édification du système pénal plutôt que vers la prévention.

Par ailleurs, beaucoup de détenus sont incarcérés pour des peines relativement courtes. Cela ne leur permet pas de participer aux programmes, ce qui rend plus difficile leur chance de se réinsérer.

"Les anciens détenus peuvent être marginalisés, discriminés, ce qui accroît le risque de récidive."

Pour finir, le problème de réinsertion des anciens délinquants tient au fait que certaines personnes ne veulent tout simplement pas les aider. En effet, elles peuvent avoir une opinion négative concernant les anciens prisonniers, remplie de préjugés et d’effroi...Cela peut se ressentir notamment dans le monde du travail où peu d’employeur accorde leur confiance. Dès lors, les anciens détenus peuvent être marginalisés, discriminés, ce qui accroît le risque de récidive.


Cela est regrettable car les détenus ont purgé leur peine. De plus, avoir fait de la prison ne signifie pas nécessairement que la personne est mauvaise, dangereuse. En effet, la dangerosité n’est pas l’unique facteur d’incarcération. La plus part du temps, cela résulte d’une inadaptation sociale liée à une situation de précarité, d’une situation sociale ou famille délicate...


Conclusion: la prévention du crime via la lutte contre la récidive permettrait de combattre le phénomène de surpopulation carcérale et par conséquent, permettrait de réduire les coûts liés aux prisonniers. Des tentatives sont faites afin d’aider les délinquants à se réinsérer dans la société et donc éviter qu’ils récidivent. Malheureusement, cela reste insuffisant et la mise en place de moyens supplémentaires, ainsi qu’un changement de regard envers les anciens détenus restent nécessaires...



L'équipe LPEH


 

[1] La criminologie est l’étude du phénomène criminel et des moyens de le combattre

[2] Source service-public.fr


281 vues0 commentaire
bottom of page