Ce focus a été publié pour la première fois le 25 novembre 2022. Il a été écrit par Mme Marie Poupiot.
« Le statut du témoin assisté est donné à une personne qui est mise en cause au cours d’une information judiciaire mais qui n’est pas mise en examen. »
Cadre général – instruction préparatoire
Dès lors que le Ministère Public, plus communément appelé le Parquet, est informé, par exemple par une plainte, de l’existence d’une infraction, il dispose de l’opportunité des poursuites. Il a notamment la possibilité de classer l’affaire sans suite, de saisir une juridiction de jugement ou encore de saisir un juge d’instruction.
Dès lors que l’affaire ne sera pas en l’état d’être jugée, il pourra demander l’ouverture d’une information judiciaire. De son autre nom, l’instruction préparatoire est une phase d’enquête qui permet de vérifier si une infraction a été constituée et si les charges qui pèsent contre un individu sont suffisantes pour que celui-ci soit jugé par une juridiction de jugement.
Aux termes de l’article 79 du Code de procédure pénale, l’instruction est obligatoire pour les crimes et, en principe, elle est facultative pour les délits. Elle est très rare pour les contraventions.
Le juge d’instruction est saisi « in rem » par le parquet à travers un réquisitoire introductif d’instance. La saisine « in rem » indique qu’il n’est saisi que des faits énoncés dans le réquisitoire et qu’il ne peut se prononcer sur d’autres faits. Il instruit à charge et à décharge. Il conduit les investigations afin de recueillir les informations utiles à la manifestation de la vérité, que ces informations soient ou non favorables à la personne mise en cause.
Dans le cadre de sa mission, le juge d’instruction va accomplir différents actes utiles à la manifestation de la vérité : ce sont les actes de l’instruction. Ces derniers peuvent être réalisés par le juge d’instruction lui-même ou être confiés à un officier de police judiciaire ou à un autre magistrat en vertu de ce que l’on appelle une « commission rogatoire ».
Parmi les nombreux actes d’instruction, le juge d’instruction peut effectuer des auditions du témoin assisté et les interrogatoires du mis en examen.
Définitions
Le statut du témoin assisté est donné à une personne qui est mise en cause au cours d’une information judiciaire mais qui n’est pas mise en examen.
La mise en examen est une décision prise par le juge d’instruction dans le cadre d’une information judiciaire à l’égard d’une personne qui est soupçonnée d’avoir commis une infraction.
Le mis en examen est une véritable partie au procès, contrairement au témoin assisté.
L’interrogatoire de première comparution
Le juge d’instruction décide de mettre en examen une personne à l’issue d’un interrogatoire contradictoire : l’interrogatoire de première comparution.
Concrètement, cet interrogatoire intervient dans deux principales hypothèses :
Si la personne suspecte était placée en garde à vue, le ministère public peut décider de déférer cette personne devant le juge d’instruction à la fin de celle-ci, pour la mettre en examen.
Si la personne suspecte n’est pas déférée à l’issue de sa garde à vue, le juge d’instruction peut alors la convoquer pour la mettre en examen, par lettre recommandée ou notification par un officier de police judiciaire.
Lors de cet interrogatoire, le juge constate l’identité de la personne, rappelle les faits pour lesquels la mise en examen est envisagée et l’informe de ses droits qui découlent de la mise en examen. La personne interrogée est obligatoirement assistée d’un avocat (article 116 alinéa 5 du code de procédure pénale).
A l’issue de l’interrogatoire de première comparution, après avoir entendu la personne interrogée et l’avocat, le juge d’instruction peut prendre deux types de décision :
Soit la personne interrogée est mise en examen
Soit la personne interrogée est placée sous le statut du témoin assisté
Conditions pour mettre une personne en examen
Pour mettre une personne en examen, le juge d’instruction doit respecter trois principales conditions :
La mise en examen ne peut être prononcée qu’à l’égard d’une personne à l’encontre de laquelle il existe des indices graves ou concordants qu’elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission des infractions dont le juge d’instruction est saisi (article 80-1 du code de procédure pénale).
La mise en examen est obligatoire à l’égard d’une personne à l’encontre de laquelle il existe des indices graves et concordants d’avoir participé aux faits dont le juge est saisi (article 105 du code de procédure pénale).
La mise en examen ne peut être prononcée que si le juge d’instruction estime qu’il ne peut pas recourir à la procédure de témoin assisté.
Implications de la distinction
Concernant la personne mise en examen, le principe est qu’elle est présumée innocente et doit rester libre. Mais en pratique, le juge d’instruction va très souvent assortir la mise en examen d’une mesure de contrainte. Ainsi, la personne mise en examen pourra être placée sous contrôle judiciaire, sous la mesure de l’ARSE, ou en détention provisoire.
La personne mise en examen est certes soumise à des obligations mais elle bénéficie de certains droits :
Durant l’instruction, la personne mise en examen peut être assistée d’un avocat.
Elle peut ensuite demander au juge d’instruction l’accomplissement de tout acte d’enquête qui permettrait d’établir la réalité des faits.
La personne mise en examen peut aussi formuler des requêtes en nullité, c'est-à-dire demander l’annulation. Elle peut accéder aux actes de la procédure et demander une copie des pièces du dossier.
Concernant le témoin assisté, celui-ci n’est soumis à aucune mesure de contrainte, mais il possède des droits.
Le témoin assisté ne peut pas être placé sous contrôle judiciaire, être assigné à résidence ou être placé en détention provisoire.
Il ne peut pas non plus faire l’objet d’une ordonnance de renvoi ou de mise en accusation devant les juridictions de jugement.
Le témoin assisté bénéficie du droit d’être assisté par un avocat.
Comme le mis en examen, le témoin assisté peut demander des confrontations avec les personnes qui le mettent en cause et formuler des requêtes en annulation devant la chambre de l’instruction. C’est le seul acte d’instruction qu’il peut demander.
Le témoin assisté peut également avoir accès au dossier et peut garder le silence.
Enfin, le témoin assisté peut être mis en examen si le juge d’instruction relève en cours de procédure que les indices qui existent à l’encontre du témoin assisté deviennent « graves ou concordants ». Il peut également demander au juge d’instruction d’être placé sous le statut de mis en examen. En effet, il bénéficie en tant que témoin assisté de moins de droits qu’un mis en examen. C’est pourquoi cette demande pourrait lui être opportune.
Marie POUPIOT
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